Vole, petite Manon

Petite Manon

Tu te souviens, petite Manon, lorsque tu regardais la lune, la forêt, le lac depuis le milieu des champs ?

Si jeune déjà, la conscience dense et vibrante d’être vivante t’exaltait pleinement.

Ils s’interrogeaient parfois de te savoir pendant de longues heures, seule dans ta chambre.

C’est bien là que tu te sentais la plus sereinement entourée, sans rien à prétendre.

Le poids des secrets, l’hypocrisie des non-dits, les souffrances tues ont longtemps empêchés ta mue.

Maintenant que nous devenons grandes, nous savons que certains silences tuent.

_

Tu te souviens, petite Manon, combien de fois ta sensitivité, ta lucidité ont tenté d’être tamisées ?

Ces qualités qui ont servis si souvent à les comprendre sans mots, à les aider.

Leurs limites ont servi de parois aux petites cases dans lesquelles ils t’ont enfermée.

Tu as grandi et peux donc désormais en sortir sans crainte et à grandes foulées.

Tu peux peindre, lire, écrire, chanter et danser avec passion.

Tu peux laisser exploser ton goût pour la création.

_

Aujourd’hui tu le sais, petite Manon.

Ce n’est pas leur faute, ce n’est pas la tienne.

_

Aujourd’hui tu le sens, petite Manon.

Tu ne leur dois rien comme eux ne te doivent rien.

_

Aujourd’hui tu en as la force, petite Manon.

Prenons-nous par la main et colorons notre propre chemin.

_

Ne leur en veux pas, petite Manon. Ils ont fait de leur mieux.

Ne t’en veux pas, petite Manon. Tu fais de ton mieux.

_

Leurs souffrances ne sont pas les tiennes, tes aspirations ne sont pas leur leurs.

Tu n’es pas le remède à leurs blessures, ils n’ont pas à panser les tiennes.

_

Ton passé avec eux ne te prive en rien d’un présent lumineux, ni d’un futur autonome.

Ton cœur est ton seul métronome.

Déployons nos ailes.

Vole, petite Manon.

Laisser un commentaire